Jean Crotti

Crotti immense eclat de rire 1924

Immense éclat de rire, 1921. Huile sur toile, 92 x 65 cm

Jean Crotti (1878, Bulle - 1958, Neuilly-sur-Seine)

 

Né dans une famille d’origine tessinoise installée à Bulle, puis à Fribourg dès 1887, Jean Crotti part en 1901 à Paris. Son frère André, futur brillant chirurgien émigré aux États-Unis, le soutient financièrement et lui permet de suivre les cours de l’Académie Julian où il rencontre Edgar Degas. Dès 1907, il participe au Salon d’Automne et dès 1908 au Salon des Indépendants. En 1914, invité par son frère aux États-Unis, il fait la connaissance de Marcel Duchamp, rencontre essentielle pour son adhésion future au mouvement dada. Il présente en 1916, à la Montross Gallery de New York, douze tableaux à l’occasion de l’exposition dite des «Quatre mousquetaires» à laquelle prennent part également Marcel Duchamp, Albert Gleizes et Jean Metzinger. À son retour à Paris en 1916, il se lie avec la famille Duchamp. Il épouse Suzanne, la sœur de Marcel Duchamp, en 1919. Tous deux participent aux soirées et collaborent aux revues dadaïstes, 391 et New York Dada notamment. En 1921, ils signent le tract Dada soulève tout. Un manifeste d’octobre 1921, Tabu dada, lance le concept d’« une Pensée nouvelle, une Expression nouvelle, une Religion nouvelle » qui cherche à « exprimer le Mystère », cher au goût des dadaïstes pour l’ésotérisme.? Cette même année, ils présentent un grand nombre de leurs œuvres dadaïstes à la Galerie Montaigne à Paris puis, en 1923, à la Galerie Paul Guillaume. En 1925, Crotti expose à la Malik Galerie à Berlin. Ses tableaux, restés à Berlin, puis bloqués par la guerre, ne seront retrouvés qu’en 1953. En 1927, Crotti devient citoyen français. En 1937, il participe au décor du Pavillon de l’air à l’Exposition internationale, projet conçu par Robert Delaunay. En 1938, il dépose un brevet pour une nouvelle technique du vitrail sans monture de plomb, la technique dite des «gemmaux», qui sera largement répandue et exploitée, notamment pour rénover la station de métro Franklin-Roosevelt à Paris (1957). Après la Deuxième Guerre mondiale, les voyages dans le Midi de la France et les visites à son frère aux États-Unis se succèdent, ainsi que de nombreuses expositions dans les deux pays. Il est nommé Chevalier de la Légion d’honneur en 1950. Il meurt le même jour que son frère, le 30 janvier 1958, à Paris ; il sera enterré à Fribourg. 

Participant à toutes les aventures de la peinture moderne, échappant pourtant à toutes les classifications de l’histoire de l’art durant un demi siècle, Crotti a une démarche singulière, que son beau-frère Marcel Duchamp, avec son humour habituel, repère dans une lettre en 1952 : « [...] si je te dis que tes tableaux n’ont rien de commun avec ce qu’on voit généralement classé et accepté, que tu as toujours su produire des choses entièrement tiennes, [...] cela ne veut pas dire que tu aies droit à t’asseoir à côté de Michel-Ange. »